Les théories en études de genre (French Edition) by Éléonore LÉPINARD & Marylène LIEBER

Les théories en études de genre (French Edition) by Éléonore LÉPINARD & Marylène LIEBER

Auteur:Éléonore LÉPINARD & Marylène LIEBER
La langue: fra
Format: mobi
Tags: Sciences humaines et sociales
Éditeur: La Découverte
Publié: 2020-06-10T23:00:00+00:00


Doing gender : créer et fixer les différences

Dans un article publié en 1987, « Doing gender » (« Faire le genre »), dont une première version fut présentée en 1977, Candace West et Don Zimmerman vont contribuer à développer et systématiser une façon de penser le genre comme un processus interactionnel, un accomplissement pratique routinier, une réalisation des interactions quotidiennes. Cependant, contrairement à Garfinkel et Goffman, West et Zimmerman insistent davantage sur la dimension de pouvoir inhérente à la production du genre [Zaidman, 2000 ; Revillard et de Verdalle, 2006].

West et Zimmerman commencent par critiquer la façon dont, à l’époque, la distinction entre sexe et genre est usuellement conceptualisée en termes de rôles de sexe (chapitre I). Ils suggèrent de dépasser les formes d’essentialisme qu’impliquent ces théorisations. D’abord, le sexe n’est pas forcément un donné, comme le montrent les cas des enfants intersexes. Ensuite, le genre n’est pas un « contenu culturel » si variable selon les sociétés puisqu’il tend souvent à renforcer les hiérarchies entre masculin et féminin — que ce soit en termes de division sexuelle du travail, de socialisation, etc. Finalement, le genre reste trop souvent considéré dans les recherches comme un attribut fixe des individus.

En s’appuyant sur l’étude qu’a menée Garfinkel sur le cas d’Agnès, West et Zimmerman suggèrent qu’il faudrait distinguer entre sexe, catégories sexuelles et genre. Le sexe, d’abord, est le plus souvent attribué sur la base de la supposition qu’il y a deux et seulement deux sexes. Dans notre vie quotidienne, on ne peut que supposer que quelqu’un qui porte des habits masculins a un sexe masculin et réciproquement. Néanmoins, affirment-ils, on pourrait catégoriser biologiquement la sexualité des êtres humains avec plus de catégories. La catégorie sexuelle, ensuite, qui fait que l’on catégorise systématiquement les pratiques, les manières de faire et d’être comme masculines ou féminines. Selon les auteurs, on s’attend non seulement à pouvoir rendre compte de la catégorie sexuelle des individus qu’on a en face de soi, mais on présuppose par ailleurs que les autres sont en train de nous la montrer. Le genre, enfin, qui est une manière de se comporter qui renvoie à la notion d’accountability (rendre des comptes), c’est-à-dire l’idée que tous les membres de la société doivent pouvoir comprendre, rendre compte et décrire un comportement comme seyant à celui que devrait avoir le membre d’un groupe donné.

Par exemple, il arrive qu’Agnès ait une attitude qui ne correspond pas aux attendus, mais elle apprend par le biais de son fiancé et des autres femmes la manière de se positionner en tant que femme. Se faire allumer une cigarette, ne pas insister si elle n’est pas d’accord sur quelque chose, se faire promener par le bras, autant d’éléments qui correspondent aux attentes sociales de la féminité (de l’époque) et qui peuvent être décrits comme typiques de cette catégorie spécifique.

À l’encontre de la perspective développée par Goffman, qui, selon West et Zimmerman, ne verrait la pratique de genre que comme secondaire, ces derniers insistent sur l’omniprésence du genre dans les interactions.



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